La route du vin

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Que reste-t-il de la tradition vinicole rueilloise ? À l’heure de la Fête des vendanges et avant de déguster le nouveau millésime de Rueil-Buzenval, partons sur les traces des vignobles d’antan.

Chemins des Vignes, rue des Pince-Vins, rue Cuvier, rue des Bons-Raisins, place des Maîtres-Vignerons..., Rueil conserve dans sa toponymie le souvenir de l’époque où la vigne prospérait. D’ailleurs, la Ville possède encore sa propre vigne (1). Plantée au cépage Sauvignon et vendangée par la confrérie des clos de Rueil-Buzenval, elle produit le vin de Rueil-Buzenval.

Les boit-sans-soif

La vigne à Rueil relève d’une histoire très ancienne qui se mêle à la tradition agricole d’Île-de-France, dont elle fut la culture principale pendant des siècles. « En 871, l’on retrouve l’énumération de champs, bois et " vignes" dans le titre de donation de Ruel-en-Parisis (2) par Charles le Chauve à l’abbaye de Saint-Denis, indique Dominique Lécroart, membre de la S.H.R.M. En 1113, Rueil est même l’un des principaux producteurs de vin pour l’abbaye et, deux siècles plus tard, les vignes de Malmaison sont jugées "d’un bon rapport", tandis que les habitants sont qualifiés de “boit-sans-soif”. »

L’émeute de Rueil

En 1598, le vin fut à l’origine d’une véritable émeute. En effet, les vignerons avaient l’habitude de vendre leurs produits sans intermédiaire, et « si toute la récolte n’était pas vendue, la coutume voulait qu’on accrochât une branche d’arbuste au-dessous de la porte pour indiquer aux passants qu’il y avait du vin à vendre », racontait Liliane Kalenitchenko, ancienne chargée de mission auprès du cabinet du maire et mémoire de la ville. Quand le parlement de Paris proclama un édit ordonnant à tous les vignerons d’écouler leur production place de Grève, ceux de Rueil s’y refusèrent. La bagarre avec la maréchaussée fut inévitable, et les Ruellois, malgré leur résistance, durent se soumettre. Cet épisode fut relaté dans un long poème en latin intitulé L’Émeute de Ruel (consultable au musée).

Naissance des guinguettes

La production vinicole se poursuivit aux siècles suivants. Dans son domaine du château du val de Ruel, le cardinal de Richelieu cultivait des vignes. Il y fit même planter le très apprécié muscat de Frontignac. Au début du XIXe siècle, la moitié de la population active exerçait le métier de vigneron et, en 1845, les vignes couvraient 384 hectares du territoire. En 1854, la récolte était toujours considérable, mais « la qualité était tellement médiocre que le vin ne pouvait se conserver qu’une année  », écrivait Adrien Cramail, maire de Rueil au préfet de Versailles. C’est une des raisons pour lesquelles les vignerons obtinrent la permission « de tenir cabaret », les célèbres guinguettes.

De la vigne aux cultures maraîchères

À l’aube du XXe siècle, les invasions de phylloxéra (une sorte de puceron ravageur de la vigne), le développement des transports qui importaient des vins du midi de bien meilleure qualité et l’urbanisation condamnèrent la culture de la vigne à Rueil. Les terres furent alors consacrées à la production maraîchère. Seules quelques familles, tels les Bertheville et les Ibert, continuaient à cultiver les raisins, mais uniquement pour leur consommation personnelle.

Il fallut attendre les années 80 pour que la tradition du vin retrouve une place publique à Rueil grâce à la confrérie des Clos de Rueil-Buzenval.

(1) Elle est répartie sur deux terrains, l’un de 1150 m² avec 750 pieds rue Cuvier, l’autre de 400 m² avec 150 pieds rue du 19-Janvier. (2) Autrefois, Rueil s’orthographiait « Ruel ». (3) Membre de la confrérie des clos de Rueil-Buzenval, auteur de son hymne.

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé (article L. 3323-4 du Code de la santé publique).