Entrez dans le monde d’Osiris

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Fermé pour rénovation depuis 2003, le Pavillon Osiris a rouvert ses portes au public. Il accueille désormais la collection du donateur éponyme, qui acquit le château de Malmaison aux enchères en 1896 avant de le réhabiliter et d’en faire don à l’État. Un voyage historique entre Second Empire et IIIe République.

Bien qu’il ait apporté un soin méticuleux à la préservation de sa mémoire, Daniel Iffla, autorisé à porter le patronyme d’Osiris par décret impérial du 24 août 1861, demeure injustement méconnu des Rueillois. La restauration du pavillon qui lui doit son nom nous offre cependant l’opportunité de (re)découvrir un personnage clé de l’histoire du château de Malmaison, qu’il arracha au sort funeste du morcellement et de la ruine.

Un humaniste nationaliste

D’origine modeste, Daniel Iffla naquit le 23 juillet 1825 au sein de la communauté juive dite « portugaise » de Bordeaux. À l’instar de ses concitoyens Pereire ou Mirès, il fit fortune dans la banque. À la tête d’un immense patrimoine, il s’investit dans des oeuvres de bienfaisance et de mécénat architectural, scientifique et artistique, puis légua l’essentiel de son capital à l’Institut Pasteur. Des choix dictés par les valeurs tout à la fois romantiques, positivistes, humanistes et patriotiques d’un « Français israélite » porté à la surenchère nationaliste, dévoué au culte de la Révolution émancipatrice, de l’épopée napoléonienne et de la République assimilatrice, sans pour autant renier son appartenance confessionnelle. Philanthrope mondain à ses heures, cet amoureux des lettres et des arts, parfois enclin à l’ostentation, ne manquait aucune occasion de célébrer les héros d’une nation qu’il voulait rayonnante.

Le sauvetage de la Malmaison

Rejetant la perspective que le château de Malmaison, en voie de délabrement, ne tombât « entre les mains d’un étranger ou de quelque acheteur indifférent à son caractère historique », il en fit l’acquisition, lui restitua son identité napoléonienne, puis l’offrit à l’État à condition qu’il devînt un musée. « Ma volonté, que je tiens à exprimer ici dans toute sa vigueur, n’est donc pas de faire de la Malmaison un lieu de pèlerinage pour les partisans d’un régime déchu, mais un sanctuaire de patriotiques souvenirs pour les Français soucieux de la gloire de leur pays », tient-il alors à préciser. En 1898, il envisagea d’édifier un pavillon dans le domaine afin d’y abriter sa collection personnelle. Le 16 janvier 1904, trois ans avant sa mort, le musée national de Malmaison était institué par décret du président Loubet, mais le pavillon ne devait voir le jour que beaucoup plus tard.

Une collection éclectique

Ouvert en 1924, rénové pour la première fois dans les années 70, ce dernier présentait diverses expositions et collections de grands donateurs, au mépris de la vocation que lui avait assignée son concepteur. « Grâce à la rénovation qui vient de s’achever, financée par l’État et confiée à un cabinet de jeunes architectes menés par Florent Rougemont, les dispositions testamentaires d’Osiris sont enfin respectées dans leur intégralité », souligne Céline Meunier, conservateur au musée national du château de Malmaison. Derrière des vitres frappées d’inscriptions hiéroglyphiques du Moyen Empire, les visiteurs peuvent apprécier l’étonnante mise en scène d’une collection de 260 œuvres emblématiques des goûts artistiques de leur propriétaire : dessins exceptionnels, peintures hollandaises et italiennes, vases grecs, statuettes égyptiennes, sculptures, armes, objets décoratifs exotiques, mobilier XIXe, sans oublier les représentations du panthéon des illustres, de Moïse à la tragédienne Rachel, en passant par Voltaire et Gounod. Un univers riche de surprises et de mystères, à l’image d’Osiris !